On a des choses à vous dire.
Des pas
Des chutes
Des pas
Des chutes
DES PAS
DES CHUTES
Un cri
La sueur
Un gémissement
La peur
Des rires
Des pleurs
Un sourire
Le coeur
La scène
La musique
Des pas
Des applaudissements
*****
Les perles de sueurs qui tombent sur son front, sa peau, puis ses yeux le brûlent un peu à cause du maquillage. Son torse se soulève de façon frénétique malgré sa maîtrise parfaite et son corps qui garde cette classe qui lui est propre. Jusqu'à ce que le rideau tombe, il ne bouge pas malgré les crampes dans ses mollets et ses orteils qui hurlent au scandale. Tout ce qu'il entend, c'est son sang qui bouillonne et tambourine à ses tempes. Tremblant, il se relâche enfin de sa position absolument inconfortable avant de se redresser lentement. Derrière l'épais rideaux rouges, les applaudissements vont bon train, comme à chaque fois. Il ne sourit pas, il a cette réputation de bitch doublée d'un requin ambitieux comme pas permis et qui semble n'être satisfait de rien. C'est faux, il est juste perfectionniste comme personne d'autre ici.
Passant une main dans ses cheveux blonds, il observe le metteur en scène plus loin, puis le directeur de la troupe avant de regarder le rideau s'ouvrir à nouveau sur le public enjoué et les musiciens qui saluent encore. Ils avancent alors, faisant de même, comme à chaque fin de représentation. Les roses pleuvent sur scène, parce que c'est une technique encore courante, vieillotte et il n'y voit aucun intérêt. Néanmoins, il ramasse une rose en voyant une étiquette après celle-ci, mise à son nom.
Les lumières s'éteignent, il lâche la main moite qui le tenait avant de s'essuyer sur son body, comme dégoûté de ça. Il part la tête bien droite et avance jusqu'à sa loge personnelle. Tout le monde se demande à quel point il peut sucer le directeur pour en avoir une. Déposant la rose, il commence alors à se démaquiller sagement, une vague musique en tête qui le fait taper du pied parfois, pour créer le rythme. La porte s'ouvre, se ferme, le verrou s'enclenche. Il regarde la silhouette qui vient vers lui et lui passe la main sur sa nuque humide. Un frisson lui échappe.
« Ta main est glacée. » Il ne le dit pas d'un ton mielleux, mais autoritaire, il n'aime pas ce choc thermique. La main se dégage, se retire, mais non sans lui griffer un peu la peau.
Il gronde intérieurement, mais ne montre pas comme ça le fait chier. La main attrape la rose et un rire fin s'échappe d'une bouche à l'accent anglais.
« Une admiratrice. » « Ou un admirateur » rétorque-t-il sans hésitation. Il sait que cette remarque va faire mouche et il n'a même pas besoin de lever les yeux pour le sentir furibond.
« Tu… » La main revient, cette fois-ci pour se loger à l'arrière de son crâne et attraper ses cheveux blonds afin de les tirer, lui faisant basculer sa tête vers l'arrière afin que leurs regards se croisent.
« Tu es à moi. Je te possède, est-ce clair ? » « Comme de l'eau de roche... » Il geint avant de recevoir un baiser au goût cigarette mentholée. Il déteste le tabac. Mordant la lèvre de son directeur, il se lève ensuite.
« Je dois finir de me démaquiller, puis me doucher si tu veux toujours aller à la soirée après rencontrer tes investisseurs. » Un autre rire. Il soupire.
« T'as hâte de les baiser? » Il avance et lui caresse la bouche avant de lui maintenir les joues fermement.
« Sois docile avec eux, j'ai besoin de leur argent. » Il le relâche et s'en va, le laissant seul dans ses tourments. De rage, ses poings s'abattent sur un mur et il y dépose son front, grinçant des dents.
Se reprenant, il fait quelques pas vers sa coiffeuse, continuant son rituel en gardant sa prestance ordinaire. Il voulait être une étoile. Briller sur scène. Ne plus être un orphelin. Devenir quelqu'un. Il n'avait que 16 ans lorsqu'il est tombé sur cet homme charismatique. Deux semaines et il l'a suivi au bout du monde. Il l'a aimé. Ouais, il l'a aimé. C'était qu'un jeune voulant une meilleure vie. Il n'a pas compris de suite ce qui allait lui tomber sur le coin de la gueule. Alors, il l'a aimé avant de voir le loup sous le déguisement du gentleman. Il aurait dû se méfier, mais il voulait quitter Incheon. Il ne voulait rien d'autre. Et maintenant, il est une étoile doublée d'une pute que personne ne semble apprécier, ni même, essayer d'apprécier.